Sous l’empire romain

et plus par humanité

que par piété chrétienne. 

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Le sado-masochiste Robert Garrison sera cloué sur une croix en bois le dimanche de Pâques 31 mars à Los Angeles pour honorer le sacrifice de Jésus Christ.

Une initiative jugée blasphématoire par de nombreux Chrétiens. Est-ce pour cela que la crucifixion a disparu du monde chrétien?

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Peut-être. Cela se serait passé en l’an 312 de notre ère, à la bataille du pont de Milvian, quand l’empereur romain Constantin a une vision: une croix de lumière dans le ciel accompagnée de ces mots «Par ce signe tu vaincras».

Cette vision non seulement amène Constantin à se convertir au christianisme mais lui donne une conscience particulière des souffrances et de la mort du Christ.

Selon une explication courante, Constantin aurait interdit la crucifixion peu de temps après la révélation.

Pour autant, il existe des doutes sur cette histoire.

Les plus importants tiennent au fait qu’il existe des témoignages sur le fait que des crucifixions officielles ont continué dans l’empire romain tout au long du règne de Constantin. Julius Firmicus Maternus, par exemple, affirme que la crucifixion était encore un chatiment légal deux décennies après la soi-disant décision de Constantin de l’interdire.

Le plus ancien document incontestable déclarant l’interdiction de la crucifixion est le Code de Théodose, publié plus d’un siècle après la mort de Constantin.
Agoniser pendant des jours

Et puis si Constantin a bien mis fin à la crucifixion, il n’est pas évident qu’il l’ait fait par hommage à la façon dont le Christ a été exécuté.

Aurelius Victor, le premier historien qui a affirmé que Constantin a banni la crucifixion, explique que l’empereur était plus motivé par un sentiment d’humanité que par la piété.

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La crucifixion est une façon particulièrement atroce de mourir, bien pire que le laisse à penser le Nouveau Testament.

Même si le Christ est mort en quelques heures, de nombreuses victimes de la crucifixion agonisaient pendant des jours.

Même à l’époque, cela était considéré comme un chatiment particulièrement cruel, réservé essentiellement à ceux qui contestaient l’autorité de l’Etat comme les insurgés et les soldats rebelles (Joel Marcus de l’Université Duke décrit la crucifixion comme une «exaltation parodique» qui donne aux rebelles la gloire qu’ils cherchent mais sous une forme grotesque).

Selon certaines sources, Constantin a remplacé la crucifixion par la pendaison, une méthode d’éxécution moins douloureuse. La suppression de la crucifixion par Constantin si elle a existé était en tout cas un élément parmi un ensemble de réformes ce qui laisse à penser qu’il était motivé par un sentiment de pitié.

Marqué au fer les visages a été, par exemple, également interdit à la même période.

Une réforme qui n’a rien à voir avec l’exécution du Christ.
Une fascination tardive de la chrétienté pour la croix

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Que Constantin ait ou non mis fin à la crucifixion romaine, il a en tout clairement initié la fascination de la chrétienté pour la croix et la crucifixion.

Avant le règne de Constantin, les images de crucifixion étaient essentiellement utilisées par des païens pour se moquer des Chrétiens.

Les Alaxamenos graffito du troisième siècle montrent un croyant se tenant à côté d’un homme à la tête d’âne sur un crucifix. L’inscription se lit «Alamenos prie Dieu».

Ce n’est pas avant le cinquième siècle que les Chrétiens ont adopté massivement la crucifixion comme leur propre symbole et que les croyants ont commencé à chercher des morceaux de la croix du Christ.

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La crucifixion appartient aujourd’hui à l’histoire un peu partout dans le monde mais existe encore dans quelques pays.

L’Arabie Saoudite semble être le leader dans ce domaine et crucifie encore parfois des violeurs et d’autres grands criminels. Le royaume vient juste il y a quelques jours de crucifier un homme. Le Yémen aussi a crucifié des criminels au cours des dernières années.

Dans le Moyen-Orient moderne, les condamnés sont en général décapités et tués avant d’être publiquement exposés sur une croix ou un poteau (l’exécution avant la crucifixion publique était aussi souvent pratiquée dans le monde ancien).

Des paysans russes ont crucifié des femmes considérées comme des sorcières durant la famine de 1921.

Des élus américains suggèrent aussi parfois en plaisantant de réintroduire la crucifixion. Revenant ironiquement sur l’idée d’exaltation, un élu de Floride avait proposé en 1999 de crucifier un homme qui se trouvait dans le couloir de la mort et se prenait pour Jésus Christ.

Brian Palmer

Traduit par Eric Leser