L’horloge de la fin du monde, ou horloge de l’Apocalypse (Doomsday Clock en anglais), est une horloge conceptuelle créée peu de temps après le début de la guerre froide et régulièrement mise à jour depuis 1947 par les directeurs du Bulletin des scientifiques atomistes de l’Université de Chicago, sur laquelle minuit représente la fin du monde.
L’horloge utilise l’analogie du décompte vers minuit pour dénoncer le danger qui pèse sur l’humanité du fait des menaces nucléaires, écologiques et technologiques.
Depuis le 22 janvier 2015, l’horloge affiche minuit moins trois (23:57).
À l’origine, cette horloge représentait la possibilité d’une guerre nucléaire mondiale, en soulignant la menace liée à la prolifération des armes nucléaires ; mais, depuis 2007, l’horloge prend également en considération les perturbations dues au changement climatique, les problèmes liés aux hydrocarbures (pic pétrolier, géopolitique du pétrole) ou encore les « nouveaux développements dans les sciences du vivant qui pourraient infliger des dommages irrévocables », c’est-à-dire les risques liés aux nouvelles technologies (nanotechnologie, biotechnologie, etc.)1.
Le nombre de minutes restant avant minuit est mis à jour périodiquement. Ainsi, en 2007, l’horloge de l’Apocalypse indiquait minuit moins cinq (23:55), après avoir été avancée de deux minutes, le 17 janvier 2007, à la suite des tensions dues aux ambitions nucléaires respectives de l’Iran et de la Corée du Nord, ainsi qu’à l’insistance des États-Unis à évoquer l’utilité stratégique des armes nucléaires, et l’échec des tentatives de sécurisation des stocks d’armes et la présence de 26 000 têtes nucléaires aux États-Unis et en Russie.
Sur le graphique ci-dessus, l’échelle verticale représente le temps qu’il reste sur cette horloge jusqu’à l’heure fatidique de minuit (00:00). Les périodes rouges représentent les périodes de tensions internationales pendant lesquelles on considère que l’heure de la fin du monde approche. À l’inverse, les périodes en bleu représentent des périodes de détente pendant lesquelles l’heure de la fin du monde semble s’éloigner. À sa création, en 1947, l’horloge indiquait 23:53, soit minuit moins sept.
Chronologie des modifications de l’horloge
Année | Minutes restantes | Heure | Degré de modification | Raisons |
---|---|---|---|---|
1947 | 7 | 23:53 | — | Création de l’horloge. |
1949 | 3 | 23:57 | −4 | L’Union soviétique fait ses premiers essais nucléaires. |
1953 | 2 | 23:58 | −1 | L’URSS et les États-Unis testent des engins thermonucléaires à neuf mois d’intervalle. L’horloge est cette année-là au plus près de minuit depuis sa création. |
1960 | 7 | 23:53 | +5 | L’horloge est reculée, en réponse à une coopération scientifique accrue et à la compréhension du public envers les dangers de l’arme nucléaire. |
1963 | 12 | 23:48 | +5 | L’URSS et les États-Unis signent le Traité d’interdiction partielle des essais nucléaires, limitant les tests d’engins nucléaires dans l’atmosphère. |
1968 | 7 | 23:53 | −5 | La France et la Chine sont désormais en possession de l’arme nucléaire (respectivement en 1960 et 1964), des conflits déchirent le Moyen-Orient, l’Asie du Sud et le Viêt Nam. |
1969 | 10 | 23:50 | +3 | Le sénat américain ratifie le Traité de non-prolifération nucléaire. |
1972 | 12 | 23:48 | +2 | L’URSS et États-Unis signent les négociations sur la limitation des armements stratégiques (SALT I) et le traité ABM (anti-missiles balistiques). |
1974 | 9 | 23:51 | −3 | L’Inde teste sa première arme nucléaire, Smiling Buddha ; les négociations SALT II (seconde phase de limitation) échouent. |
1980 | 7 | 23:53 | −2 | Nouveaux échecs dans les négociations avec l’URSS, augmentation du nombre de conflits nationalistes et d’actions terroristes. |
1981 | 4 | 23:56 | −3 | La reprise de la course à l’armement, des conflits en Afghanistan, en Afrique du Sud et en Pologne ajoutent à la tension internationale. |
1984 | 3 | 23:57 | −1 | Nouvelle accélération de la course aux armements faisant suite à la politique de Ronald Reagan. |
1988 | 6 | 23:54 | +3 | L’URSS et les États-Unis signent un traité visant à éliminer les armes nucléaires de moyenne portée, les relations entre les deux grandes puissances s’améliorent. |
1990 | 10 | 23:50 | +4 | Chute du Mur de Berlin, succès des mouvements anti-communistes en Europe de l’Est ; la fin de la guerre froide approche. |
1991 | 17 | 23:43 | +7 | L’URSS et les États-Unis signent le Traité de réduction des armes stratégiques et dislocation de l’URSS. L’horloge est alors au plus loin de minuit depuis sa création. |
1995 | 14 | 23:46 | −3 | Les dépenses militaires mondiales continuent à un niveau équivalent à l’époque de la guerre froide ; des inquiétudes naissent quant à la possible prolifération des armes nucléaires dans la Russie post-soviétique. |
1998 | 9 | 23:51 | −5 | L’Inde et le Pakistan testent tous deux des armes nucléaires dans l’hypothèse d’une agression mutuelle. L’ancien bloc soviétique et les États-Unis ne réussissent pas à tenir leurs engagements de réduction des stocks d’armes existants. |
2002 | 7 | 23:53 | −2 | Peu de progrès sont faits dans le désarmement nucléaire global : les États-Unis rejettent une série de traités de contrôle des armes et annoncent leur intention de se retirer du traité anti-missiles balistiques. Des groupes terroristes cherchent à acquérir l’arme nucléaire. |
2007 | 5 | 23:55 | −2 | Essai nucléaire nord-coréen du 9 octobre 2006, les ambitions avouées de l’Iran, l’insistance des États-Unis à évoquer l’utilité stratégique des armes nucléaires, l’échec des tentatives de sécurisation des stocks d’armes et la présence de 26 000 têtes nucléaires aux États-Unis et en Russie amènent l’horloge à 23:55. Les experts chargés d’évaluer le danger pour la civilisation ajoutent les changements climatiques aux grandes menaces, au côté du risque de conflit nucléaire global. |
2010 | 6 | 23:54 | +1 | Coopération mondiale pour réduire l’arsenal nucléaire et son incitation à limiter l’émission des gaz à effet de serre. |
2012 | 5 | 23:55 | -1 | Dangers clairs et imminents de prolifération nucléaire et de réchauffement climatique, ainsi que par la nécessité de trouver des sources d’énergie sûres et durables. |
2015 | 3 | 23:57 | -2 | Le réchauffement climatique incontrôlé et la course aux armes nucléaires, résultant de la modernisation des énormes arsenaux, représentent des menaces extraordinaires et indéniables à la survie de l’humanité. Malgré des évolutions légèrement positives dans le domaine du changement climatique, les efforts actuels sont tout à fait insuffisants pour empêcher un réchauffement catastrophique de la Terre. L’année 2014 étant celle la plus chaude depuis 1880. Pendant ce temps, les États-Unis et la Russie ont lancé de vastes programmes pour moderniser leurs arsenaux nucléaires et ainsi saper les traités existants sur les armes nucléaires. |